© Baptiste Soubra
Bienvenue sur la page des actualités locales d'avril 2024.
Au sommaire :
1) Retour sur la Grande Maraude Solidaire
2) Mobilisation pour protéger le mémorial aux mort·es des frontières
3) Quels effets de l'arrêt du 2 février du Conseil d’État sur la frontière franco-italienne ?
4) Les conséquences du pacte européen sur la migration et l'asile
Découvrez tous les articles en défilant vers le bas !
Au sommaire :
1) Retour sur la Grande Maraude Solidaire
2) Mobilisation pour protéger le mémorial aux mort·es des frontières
3) Quels effets de l'arrêt du 2 février du Conseil d’État sur la frontière franco-italienne ?
4) Les conséquences du pacte européen sur la migration et l'asile
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1) Retour sur la Grande Maraude Solidaire
Le 16 mars nous étions près de 700 à arpenter les rues de Montgenèvre et les chemins de montagne pour visibiliser notre soutien aux personnes exilées qui traversent la frontière et à celles et ceux qui leur portent assistance en dépit des tentatives d'entraves à la solidarité.
Merci à toutes et à tous pour cette mobilisation record ! |
Pour rappel, le texte d'appel de cette édition :
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Les communiqués de presse que nous avons publié :
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Communiqué de presse de lancement (publié le 08/03/2024) Désarmons les frontières, résistons à bras ouverts ! Des associations, collectifs et militant·e·s des trois frontières - franco-italienne, franco-britannique et franco-espagnole - se mobilisent le 16 mars à Montgenèvre pour dénoncer à l'unisson la militarisation des frontières françaises. Communiqué de presse de conclusion (publié le 20/03/2024) Face aux politiques d'invisibilisation de la situation des personnes exilées dans le Briançonnais, une mobilisation citoyenne plus importante que jamais pour la Grande Maraude Solidaire 2024. |
La journée a débuté par une conférence de presse publique sur « la militarisation des frontières françaises dans le contexte de durcissement des politiques migratoires et de la loi Darmanin » avec à la tribune des associations nationales et locales d’autres zones frontalière :
Alors que nous avions largement diffusé les invitations et que nous proposions une option pour suivre l’événement à distance, aucun journaliste ou élu·e local·e n’a répondu présent. Nous étions cependant près de 200 dans la salle, preuve que la population ne s'habitue pas à ces politiques migratoires injustes et souhaite s'informer.
Vous pouvez regarder l'enregistrement ici :
- Le Gisti (Groupe d'information et de soutiens des immigrés)
- L'Anafé (Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers)
- Médecins du Monde
- La fédération Etorkinekin Diakité (frontière franco-espagnole)
- Emmaüs Roya (frontière franco-italienne basse)
- Union syndicale Solidaires
Alors que nous avions largement diffusé les invitations et que nous proposions une option pour suivre l’événement à distance, aucun journaliste ou élu·e local·e n’a répondu présent. Nous étions cependant près de 200 dans la salle, preuve que la population ne s'habitue pas à ces politiques migratoires injustes et souhaite s'informer.
Vous pouvez regarder l'enregistrement ici :
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Comme chaque année, le cortège s’est directement adressé à la police aux frontières (PAF) pour enjoindre les forces de l'ordre à résister à leur tour. Personnes concernées et associations ont ainsi mis les agents devant leurs responsabilités : en plus d’être dangereux, inutiles et inefficaces, leurs agissements sont bien souvent illégaux. Il leur a d'ailleurs été rappelé qu'ils et elles peuvent participer à mettre fin aux violations des droits des personnes exilées en refusant d'exécuter des ordres manifestement illégaux.
(Re)découvrez ici notre livret "Au nom de la loi" qui s'adresse directement aux forces de l'ordre :
(Re)découvrez ici notre livret "Au nom de la loi" qui s'adresse directement aux forces de l'ordre :
2) Mobilisation pour protéger le mémorial aux mort·es des frontières
Comme vous la savez sans doute, des solidaires de Briançon ont érigé, aux portes de la ville un monument en hommage aux mort·es des frontières a l’occasion de la journée de mobilisation transnationale de la commémor'action. Ce monument a pour but de ne pour ne pas oublier les noms des 10 personnes en situation d’exil qui ont perdu la vie entre Oulx, Briançon et Modane et des 2 autres portées disparues. Il a été construit près du pont d’Asfeld à Briançon, lieu hautement symbolique puisqu'une personne exilée, Mahadi, y a perdu la vie le 29 octobre dernier.
Retrouvez plus d'informations sur la construction de cairn commémoratif sur page des actualités du mois de février en cliquant ici.
Retrouvez plus d'informations sur la construction de cairn commémoratif sur page des actualités du mois de février en cliquant ici.
L’installation de ce mémorial a reçu un soutien national dans une tribune signée par des chercheur·ses de renommée mondiale, des parlementaires, des représentant·es d’ONG et des figures publiques reconnues et respectées. Briançonnaises et Briançonnais lui ont aussi apporté leur soutien en le fleurissant et en s'y recueillant. Il a aussi intéressé quotidiennement les touristes passant à proximité.
Le 7 mars, la mairie de Briançon nous a fait savoir qu'elle souhaitait retirer le monument (à compter du 22 mars) en justifiant que nous ne pouvions pas nous soustraire aux règles et Lois en vigueur. Il est vrai qu'aucune autorisation préalable n'a été formulée, mais nous interrogeons en retour le besoin d'une autorisation pour ériger un cairn en hommage à des mort·es. Partout en montagne, nous honorons la mémoire de nos proches et des alpinistes décédé·es en tentant d’atteindre des sommets. Comment ne pas honorer celle de personnes qui ont perdu la vie dans ces mêmes montagnes en tentant de rejoindre des conditions de vie dignes ?
Pour protéger la stèle, une pétition a été lancé. En moins de 3 semaines, elle a recueillie près de 6000 signatures. Le 20 mars, lors du conseil municipal, le maire de Briançon a refusé d’échanger avec des habitant·es du Briançonnais qui souhaitaient l’interroger au sujet de la préservation du mémorial des mort·es des frontières qu’il a menacé de faire enlever. Au même moment, une veillée solidaire avait lieu au mémorial pour organiser la mise en place de permanences citoyennes à partir de ce vendredi 22 pour tenter de préserver le monument. Elle a réuni des associatifs, des lycéen·nes et des habitant·es solidaires, a été l’occasion de faire un point de situation et d’échanger collectivement autour de deux questions : que pouvons-nous faire pour tenter de préserver le mémorial ? Que voulons-nous faire si le maire le fait enlever ?
Le mardi 26 mars 2024, à l'aube, avant que les permanences ne commencent, la mairie de Briançon a fait intervenir les services techniques de la ville escortés par la Police pour faire retirer le mémorial aux mort·es des frontières érigé porte de Durance. Voici ce que les solidaires ont retrouvé au petit matin :
Malheureusement pas étonné·es, les solidaires du Briançonnais dénoncent l'indécence de la mairie et se disent déterminé·es à faire valoir la mémoire des personnes décédées. Dès le lendemain, 12 cairns sont apparus au même emplacement, porte de Durance. Nous vous encourageons à continuer de faire vivre ce lieu, de le fleurir et y faire spontanément des petits cairns pour ne pas oublier les noms de ces 12 personnes : Blessing, Mamadi, Mohamed, Douala, Tamimou, Mohamed, Mohammed, Fahallah, Ullah, Moussa, Mohamed, Mahadi. Les plaques commémoratives et la sculpture qui ornait la stèle ont pu être récupérés auprès des services techniques.
3) Quels effets de l'arrêt du 2 février Conseil d’État sur la frontière franco-italienne ?
Le 2 février dernier, le Conseil d’État publiait un arrêt s’opposant aux pratiques de remises de refus d’entrée systématiques aux personnes exilées interpellées à la frontière. Cette décision supprimait l’article du CESEDA (Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) qui permettait d’opposer des refus d’entrée en toutes circonstances et sans aucune distinction en cas de rétablissement des contrôles aux frontières intérieures (voir le communiqué de presse inter-associatif ici).
Dans la foulée, nous avons observé un changement de pratiques à la PAF de Montgenèvre : les personnes interpellées sont placées en retenue administrative pour vérification d’identité ou de droit au séjour (maximum 24 heures). Les personnes qui souhaitent demander l’asile en France ressortent libre du poste de police pour aller déposer leur demande sur le territoire. Nous constatons des pratiques très hétérogènes en matière de procédures : les retenues observées vont de quelques minutes à plus de 23h30, et des personnes ont témoigné avoir fait une demande d’asile sans que cela ne soit pris en compte.
Cette décision met-elle un terme définitif aux refoulements en Italie ? Non. Car toutes les personnes qui ne relèvent pas du droit d’asile sont refoulées à Oulx sous une procédure de réadmission, certes plus encadrée qu’une simple décision de refus d’entrée, mais qui pose les mêmes problèmes en matière d’accès aux droits. Durant la retenue administrative, les personnes devraient pouvoir bénéficier d’un interprète, d’un avocat, avoir la possibilité de prévenir une personne de leur choix, et enfin, la possibilité de former un recours contre la décision préfectorale de réadmission en Italie. Nos premières observations montrent que ces droits ne sont pas systématiquement effectifs.
Si les procédures de non-admission ont évolué, rien n’a changé concernant les pratiques de contrôles ciblés et discriminatoire, avec un dispositif important de gendarmes mobiles postés tout autour de la frontière. Par ailleurs, le dispositif de contrôle de la frontière est renforcé depuis début 2024 avec de nouveaux moyens matériels et humains mis à disposition de la PAF sur décision de la Préfecture. Neuf policiers adjoints ont été recrutés et seront affectés dans le département dès avril 2024, et notamment en renfort de la PAF. Un nouveau 4x4 ainsi qu'une seconde motoneige viennent également compléter le dispositif.
Dans la foulée, nous avons observé un changement de pratiques à la PAF de Montgenèvre : les personnes interpellées sont placées en retenue administrative pour vérification d’identité ou de droit au séjour (maximum 24 heures). Les personnes qui souhaitent demander l’asile en France ressortent libre du poste de police pour aller déposer leur demande sur le territoire. Nous constatons des pratiques très hétérogènes en matière de procédures : les retenues observées vont de quelques minutes à plus de 23h30, et des personnes ont témoigné avoir fait une demande d’asile sans que cela ne soit pris en compte.
Cette décision met-elle un terme définitif aux refoulements en Italie ? Non. Car toutes les personnes qui ne relèvent pas du droit d’asile sont refoulées à Oulx sous une procédure de réadmission, certes plus encadrée qu’une simple décision de refus d’entrée, mais qui pose les mêmes problèmes en matière d’accès aux droits. Durant la retenue administrative, les personnes devraient pouvoir bénéficier d’un interprète, d’un avocat, avoir la possibilité de prévenir une personne de leur choix, et enfin, la possibilité de former un recours contre la décision préfectorale de réadmission en Italie. Nos premières observations montrent que ces droits ne sont pas systématiquement effectifs.
Si les procédures de non-admission ont évolué, rien n’a changé concernant les pratiques de contrôles ciblés et discriminatoire, avec un dispositif important de gendarmes mobiles postés tout autour de la frontière. Par ailleurs, le dispositif de contrôle de la frontière est renforcé depuis début 2024 avec de nouveaux moyens matériels et humains mis à disposition de la PAF sur décision de la Préfecture. Neuf policiers adjoints ont été recrutés et seront affectés dans le département dès avril 2024, et notamment en renfort de la PAF. Un nouveau 4x4 ainsi qu'une seconde motoneige viennent également compléter le dispositif.
Pour approfondir le sujet, vous pouvez regarder la rediffusion de cette formation/décryptage par l'Anafé (Association nationale d'assistance aux frtontières pour les étrangers) qui revient plus généralement sur les conséquences de l'arrêt de la CJUE (du 21 septembre) et du conseil d’État (du 2 février) sur les frontières intérieures : |
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4) Les conséquences du pacte européen sur la migration et l'asile
Le mercredi 10 avril, après près de 4 ans de discussions, le Parlement européen a voté les textes qui composeront le nouveau pacte européen sur la migration et l'asile. Comme le détaillent 161 organisations de la société civile dans une déclaration conjointe publiée le 9 avril (à retrouver en entier ici), "cet accord s’inscrit dans la continuité d’une décennie de politiques qui ont conduit à la prolifération des violations des droits en Europe. De plus, ce pacte aura des conséquences dévastatrices sur le droit à la protection internationale dans l’Union européenne et permettra des abus dans toute l’Europe, y compris le racial profiling, la détention de facto par défaut et les refoulements".
Ce même communiqué identifie 5 nouveaux "systèmes de gestion des migrations dans l'Union européenne" introduits dans par le texte :
Il est encore trop tôt pour identifier les conséquences précises que le pacte aura sur la frontière franco-italienne. Nous ne manquerons pas de vous partager les éléments de terrain et d'analyse que notre travail de documentation nous permettra de faire ressortir au cours des prochains mois/années.
En attendant, nous vous proposons plusieurs ressources pour approfondir ce sujet du pacte migration et asile :
Ce même communiqué identifie 5 nouveaux "systèmes de gestion des migrations dans l'Union européenne" introduits dans par le texte :
- La détention de facto aux frontières sans aucune exemption pour des familles avec enfants de toutes âges, des procédures accélérées et inférieures aux normes pour évaluer les demandes d’asile plutôt que des évaluations complètes et équitables, et l’accent mis sur les procédures de retour avec des garanties réduites.
- Un nombre bien plus important de demandeur·euse·s d’asile se retrouveront dans des procédures frontalières et, en raison de la "legal fiction of non-entry", ne seront pas considérés comme se trouvant sur le territoire de l’UE, ce qui entraînerait une diminution des garanties de protection et augmenterait le risque de violations des droits humains et de refoulements aux frontières. Même les enfants non accompagnés peuvent être soumis à des procédures frontalières et placés en détention "de facto" lorsque les autorités nationales les considèrent comme un "danger pour la sécurité nationale ou l’ordre public". En outre, l’expérience a montré que le confinement d’un grand nombre de personnes dans les zones frontalières entraîne une surpopulation chronique et des conditions inhumaines, comme on l’a vu dans les îles de la mer Égée.
- Grâce à l’élargissement du principe du "pays tiers sûr", les demandeur·euse·s d’asile seront déclarés irrecevables et de plus en plus souvent expulsés vers des pays extérieurs à l’UE, ce qui accroît le risque de refoulement. Dans le passé, nous avons déjà pu observer ce type d’externalisation de traitement des demandes d’asile vers des pays tiers dans des accords échoués, comme l'accord UE-Turquie.
- En l’absence de voies d’accès sûres et régulières, les personnes en quête de sécurité sont contraintes d’emprunter des itinéraires de plus en plus dangereux, ce qui fait de 2023 l’année la plus meurtrière depuis 2015. Rien qu’en Méditerranée, plus de 2 500 personnes ont été déclarées mortes ou disparues l’année dernière. Le pacte n’aborde pas cette question, mais au contraire continue à renforcer la forteresse Europe.
- Une utilisation accrue des technologies de surveillance à tous les stades des procédures d’immigration et d’asile. Le Pacte représente un pas supplémentaire vers la surveillance de masse des migrants et des personnes racisées. Des technologies de surveillance seront déployées aux frontières et dans les centres de détention, des données personnelles des personnes seront collectées en masse et échangées entre les forces de police à travers l’UE, et des systèmes d’identification biométriques seront utilisés pour suivre les mouvements des personnes et pour renforcer le contrôle des migrant·e·s sans papier.
Il est encore trop tôt pour identifier les conséquences précises que le pacte aura sur la frontière franco-italienne. Nous ne manquerons pas de vous partager les éléments de terrain et d'analyse que notre travail de documentation nous permettra de faire ressortir au cours des prochains mois/années.
En attendant, nous vous proposons plusieurs ressources pour approfondir ce sujet du pacte migration et asile :
- Émission à l'air libre (Médiapart) : "Politiques migratoires : "des dispositifs mortels, dont l'effet est de tuer pour dissuader", (Rima Hassan, Sophie-Anne Bisiaux, Sophie Djigo)
- Gisti : "Tous savoir sur le "nouveau pacte sur la migration et asile" de l'Union européenne" (page régulièrement actualisée)
- La Cimade : "Le Parlement européen adopte le pacte sur la migration et l’asile : une réforme indigne et contre-productive"
- Toute l'Europe : "Le parlement européen valide de justesse le pacte sur l'asile et la migration"
- Sens public (Public sénat) : "Immigration : que vaut le pacte adopté par l'Europe?"
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